Légendes tahitiennes : l'histoire des maohis

Publié le par Arii Stef

Cet article pour Légendes Tahitiennes est une brève présentation de l'origine des tahitiens.

Paraita était agenouillé auprès de Oto’e, le vieux sage. La chaleur du four enterré se faisait sentir dans cette nuit sans étoile. Le sage lui avait raconté déjà de nombreuses légendes sur les temps passés, sur la création du monde par Ta’aroa, sur Maui qui pêcha les îles, sur le héros Rata aux multiples voyages... Mais Paraita ne se lassait pas d’écouter comment Tahiti était née. Il demanda donc au sage de lui narrer une nouvelle fois la légende de l’apparition de Tahiti. Oto’e reprit sa respiration et lentement, il commença l’histoire maintes fois répétée : il raconta comment à Havai’i une immense anguille avala la jeune fille Tere-he qui avait brisé un tabou. L’esprit furieux de Tere-he avait possédé le poisson. Le poisson s’était détaché de Havai’i et Ta’i-’a-rapu était monté sur sa tête. Il avait guidé le poisson à son emplacement actuel. Alors qu’il racontait comment les tendons de Tahiti furent sectionnés afin que Tahiti restât à son emplacement, le vieux sage se tut ; Paraita dormait. Le vieux sage regarda avec bienveillance le jeune noble. Il se félicitait de l’intérêt de celui-ci pour l’histoire des maohis. Il sera un jour un grand chef, savant et rusé !

Légendes Tahitiennes a pour cadre potentiel toute la Polynésie mais s’intéresse plus particulièrement à l’archipel de la Société et dans une moindre mesure aux îles Tuamotu. Nous appellerons dans le jeu l’archipel de la Société « archipel maohi », cette dernière dénomination sonnant plus tahitien, et nous nous réferrons à l’archipel des Tuamotu par son ancienne dénomination de Paumotu. Il faut savoir que les tahitiens (ou maohis) sont des représentants d'un peuple plus vaste qui a conquis les eaux de l'Océan Pacifique, le peuple polynésien. Les origines et les migrations des polynésiens restent un grand sujet de spéculations parmi les archéologues et les historiens. Le principal objet de débat est de savoir d’où vient ce peuple qui, sans connaître le métal, a colonisé les îles d’un domaine océanique de plusieurs millions de kilomètres carrés. Un autre sujet de débat concerne les flux migratoires au sein de la Polynésie : quelles îles ont été peuplées en premier, quelle est l’origine de la population de tel archipel ? Parmi toutes les théories avancées, des plus sérieuses aux plus farfelues, quelques éléments de vérité semblent se dégager quant à l’histoire des polynésiens.

 

L’origine des polynésiens

Les ancêtres des polynésiens, seraient originaires du sud-est asiatique, berceau des peuples austronésiens. On pense aujourd’hui que l’île de Taiwan et la côte sud de la Chine pourraient être la terre d’origine de ces peuples. L’hypothèse de l’origine asiatique se fonde d’abord sur des évidences linguistiques. La langue polynésienne appartient à la même famille que les langues de Malaisie, d’Indonésie, de Mélanésie ou de Madagascar. La génétique, la datation des peuplements de chaque île et l’étude de la botanique confirment cette origine asiatique. A contrario, de nombreux historiens pensaient que les polynésiens venaient d’Amérique et se sont efforcés de le démontrer. Cette origine américaine des polynésiens semblait confirmée par la présence d’une plante d’origine américaine, la 'umara (patate douce) dans toutes les îles polynésiennes. Avec la découverte d’ossements de poulets polynésiens au Chili, la preuve de contacts anciens entre polynésiens et indiens d’Amérique est établie.

Les peuples austronésiens avaient une grande habileté à la navigation dès les premiers temps de l’histoire. Les premières traces de bateaux de haute mer dateraient de -5000 avant Jésus-Christ. Une civilisation appelée Lapita aurait commencé à coloniser la Mélanésie à partir de 2200 avant J.C, y rencontrant les ancêtres des papous, déjà présents dans cette région. Ils auraient continué leur migration plus à l’ouest pour atteindre les archipels Tonga et Samoa vers -1200.

LES LAPITA

On appelle cette première civilisation austronésienne Lapita du nom d’un site de Nouvelle Calédonie où l’on a trouvé des poteries caractéristiques. Ces poteries sont identiques à celle des premiers polynésiens de Tonga. La civilisation Lapita couvrait donc la Mélanésie, Tonga et Samoa. L’abandon ultérieur de la poterie, sûrement dû au manque d’argile, marque le début de la singularisation de la civilisation polynésienne. Les lapita restés en Mélanésie se seraient fondus aux populations indigènes pour créer la culture mélanésienne.

 

L’étude du patrimoine génétique des polynésiens a montré que le métissage entre les premiers habitants de la Mélanésie et polynésiens est beaucoup plus important que ne le laissaient imaginer la différence des types physiques. Plus de 60% des chromosomes Y des polynésiens actuels est de même origine que les papous.

L’origine sud-est asiatique des dingos semblent également attester que les ancêtres des polynésiens ont également accosté en Australie à cette époque.

LES PREMIERES MIGRATIONS POLYNÉSIENNES

L’étape suivante de l’histoire des polynésiens correspond aux grandes migrations qui eurent lieu, pense-t-on, vers le deuxième siècle avant Jésus-Christ, à partir des Samoa et des Tonga. Ces migrations vont amener la colonisation par les polynésiens de l’archipel maohi (actuel Archipel de la Société dont Tahiti fait partie) et de Te Fenua Enata (Iles Marquises). La raison de ce flux migratoire reste inconnue : surpopulation, faits d’aventuriers, guerres, exil ? Il est possible que plusieurs de ces hypothèses se soient conjuguées. Le nom de la première île à être colonisée reste un point de discorde parmi les spécialistes. Le site d’habitation le plus ancien retrouvé à ce jour se trouve sur un îlot dans le lagon de Maupiti. Il est également possible que les migrants se soient arrêtés lors de leur périple de plus de 1500 kilomètres dans l’archipel austral.

On ne sait pas par quel moyen les samoans de l’époque ont pu atteindre ces poussières dans l’océan infini. Sont-ils partis à l’aventure ou ont-ils eu connaissance de ces terres en y étant déroutés accidentellement ? Sont-ils les rescapés de nombreux essais infructueux ? En tout cas, ils migrèrent en nombre important et emportèrent sur leur terre d’accueil les plantes et animaux qui leur étaient nécessaires : taro, igname, arrow-root, bananier, chien, poulet, rat, porc, etc.… ce qui témoigne d’une colonisation volontaire.

La conquête du triangle polynésien

C’est ensuite à partir de Tahiti et de Te Fenua Enata (actuelles îles Marquises) que les polynésiens, dans une seconde étape de leur histoire, partirent à la conquête des autres îles du triangle polynésien. Ils atteignirent Rapa-nui (île de Pâques) vers 500 après J.C, Hawaï vers 600 et enfin Aotearoa (Nouvelle Zélande), la dernière des grandes migrations, vers 800. Ces trois archipels forment les sommets de l’aire de population polynésienne, appelée triangle polynésien. Ce triangle a des côtés longs de 11 000 kilomètres et pourraient contenir trois fois l’Amérique du Nord.

Des contacts semblent s’être longtemps maintenus entre les différentes îles polynésiennes. Avec le temps, ils s’atténuèrent et finirent par disparaître. Des rapports existèrent pourtant durant très longtemps entre archipels éloignés comme Hawaï et Tahiti. Les voyages entre archipels proches ou à l’intérieur d’un même archipel ne cessèrent jamais. Une grande unité culturelle subsistait d’ailleurs entre les différents peuples polynésiens à l’arrivée des européens. Le capitaine Cook fit dessiner une carte à un ari’i (noble) de Tahiti. Sur cette carte figuraient des îles aussi lointaines que Hawaï, Mangareva, Rotuma ou Rarotonga. Les polynésiens embarqués à bord des bateaux européens étaient à même de comprendre leurs interlocuteurs d’îles lointaines et isolées.

 

La fin d’une civilisation

La découverte des îles du Pacifique par les européens au cours du XVIIIème siècle fit  sensation. La vie des polynésiens fut au centre de toutes les curiosités. C’était un peuple semblant vivre très librement dans une nature luxuriante, obéissant à une morale naturelle... Le paradis terrestre en somme. Les qualités nautiques et les connaissances maritimes des polynésiens furent également un sujet d’étonnement. Mais dans le sillage des explorateurs vinrent les missionnaires, les marchands et les baleiniers. La civilisation polynésienne fut très vite anéantie.

Partout le christianisme, les robes missionnaires et la perte des racines culturelles se propagèrent avec une grande rapidité. Les maladies européennes, notamment vénériennes, les fusils et le désespoir faillirent vaincre ces peuples. Certains d’entre eux furent même au bord de l’extinction : la population des Enata (marquisiens), estimée à environ 200 000 individus avant l’arrivée des européens, fut réduite à quelque 2 000 personnes à l’aube du vingtième siècle. Autre exemple : à Rapa-nui, un bateau péruvien captura en 1862 la moitié de la population dont le roi et tous les lettrés pour travailler dans les mines de guano, seuls quatre revinrent, (avec des maladies européennes) laissant 600 insulaires à l’arrivée des missionnaires.

Mais la colonisation européenne n’est pas le sujet de ce jeu. Nous nous étendrons davantage sur la civilisation maohie avant l’arrivée des européens. Nous nous contenterons donc de vous conseiller la lecture des Immémoriaux de Victor Segalen.

 

Sources

Cette civilisation polynésienne a été décrite à la fois par les premiers explorateurs dont le fameux Capitaine Cook, par les missionnaires qui s’implantèrent à Tahiti (les termes et descriptions utilisés dans le jeu sont d’ailleurs largement puisés dans le livre de Teuira Henry, la petite fille d’un des premiers missionnaires de Tahiti) et par les récits des polynésiens eux-mêmes. L’archéologie apporte également sa pierre à la connaissance de la société polynésienne. Ce jeu s’inspire librement de ces récits et de l’archéologie, il ne s’agit nullement d’une thèse et je me permets de nombreuses entorses en comblant les trous de connaissance de ce monde perdu à l’aide de ma propre documentation.

Publié dans Légendes Tahitiennes

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A
<br /> On ne peut pas dire que les Polynésiens viennent du Sud-Est asiatique tant qu'on n'aura pas prouver par les marqueurs génétiques. Le groupe sanguin des Polynésiens A1 n'est pas le même que celui<br /> des Asiatiques -groupe B. Par contre les Polynésiens ont des affinités avec certaines tribus indiennes d'Amérique du Nord en ce qui concerne le gène A1. En partageant la poire en deux on peut dire<br /> que les Polynésiens sont nés dans le centre du Pacifique d'un mélange entre des Indiens d'Amérique du Nord et des Mélanésiens ( dolichocéphale et brachycéphale) que l'on peut prouver par les<br /> composants sanguins. Une étude faite par des Américains ( Prof.Dingemans et Dr Bories ) après guerre confirme ce mélange sanguin.<br /> <br /> <br />
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